L’histoire de BMW est indissociable des roadsters qui ont toujours
représenté des voitures exclusives au sommet de la gamme. Une histoire qui a
débuté dans les années 1930 avec la célèbre BMW 328, premier roadster sportif
équipé d’un 6 cylindres et qui s’est illustré dans les compétitions telles que
les 24h du Mans (lire : BMW et le Mans Classic : une histoire d'héritage). Une ligne futuriste et de nombreuses innovations sont les marques
de ce roadster. Une recette de nouveau appliquée en 1955 avec l’iconique BMW
507. Ce grand roadster, à l’inédit moteur V8 tout en aluminium, visait le
marché nord-américain avec une ligne novatrice. Sa carrosserie moderne en
aluminium imposait une fabrication artisanale trop onéreuse qui a eu raison de
son succès avec seulement 254 exemplaires produits. Un échec commercial mais
une réussite sur le plan technique et artistique. En proie aux difficultés
financières, BMW se concentre sur de nouveaux modèles à plus fort volume et
abandonne le segment des roadsters pendant de nombreuses années. Les nouvelles
normes de sécurité américaines dans les années 1970 scellent le sort des
roadsters chez de nombreux constructeurs. Le plaisir de rouler les cheveux au
vent dans une voiture réactive et joueuse a pratiquement été oublié mais les
technologies et les normes étant évolutives, le roadster fait sa réapparition
dans les bureaux d’études, notamment chez Mazda qui réfléchit activement à
ressusciter cette carrosserie avec son projet Mazda eXperience project number
5 : la fameuse MX5.
En Bavière, c’est aussi l’effervescence depuis 1985. BMW a lancé
un tout nouveau département, détaché de son siège, sous le nom "Technik". Derrière ce nom, se cachent près de 100 personnes en charge de trouver
les solutions techniques de demain. Matériaux, structures, design et nouveaux
segments automobiles sont à l’étude. Le département va très vite vouloir
montrer son savoir-faire en travaillant sur de nombreuses innovations
techniques avec le premier projet intitulé : “ la liberté sur quatre
roues ”. La carrosserie roadster est retenue comme support de
leurs travaux. C’est ainsi qu’en 1986, le concept Z1 sort et surprend tout le
monde. Sa ligne profilée, supervisée par Harm Lagaay ne ressemble à aucune
autre et séduit le monde entier. Des retours positifs qui conduisent à
envisager la production en série. C’est chose faite en 1987, avec la
présentation de la voiture sous sa forme définitive. La Z1 n’a rien perdu de sa
superbe et propose toujours de nombreuses innovations.
Dès la genèse de la Z1, les équipes ont réfléchi à plusieurs
visions différentes de “ la liberté à quatre roues ”, mais très vite
deux propositions se sont démarquées. L’une proposait un moteur central arrière
avec une transmission 4 roues motrices, l’autre favorisait la simplicité avec
un moteur central avant et une propulsion arrière. Pour des raisons de coûts de
fabrication, c’est la deuxième proposition qui a été retenue afin de permettre
l’utilisation de pièces communes avec le reste de la gamme.
C’est donc l’ensemble moteur-boite qui a été repris tel quel de la
BMW 325i e30. On retrouve alors le 6 cylindres 2.5 de 170 ch et 222 Nm de
couple et sa boîte de vitesses à 5 rapports à l’étagement long. Le moteur est
positionné derrière l’essieu avant pour avoisiner une répartition des masses
parfaite avec 49% à l’avant et 51% à l’arrière.
Une architecture classique qui a contraint les ingénieurs à
trouver de nouvelles solutions pour améliorer le Cx et l’aérodynamisme général.
C’est ainsi qu’est née la carrosserie atypique de la Z1 grâce à la soufflerie
aéro-acoustique du département Technik. Un travail minutieux a été porté à la
réduction des flux d’air à l’intérieur de l’habitacle et c’est réellement
flagrant en ayant pu rouler portes ouvertes avec un vent d’autan assez fort. Les
phares effilés et carénés, les petits rétroviseurs placés sur les montants du pare-brise
ainsi que les ailes galbées contribuent activement à l'obtention d'un Cx de 0,36
capoté et de 0,43 décapoté. Le plus gros travail se trouve sous la voiture avec
un fond très travaillé qui canalise le flux d’air jusqu’au diffuseur arrière
doté d’un large extracteur. Toute la gestion des flux a été particulièrement
travaillée au niveau de l’échappement pour permettre un meilleur appui. Un
travail rendu possible grâce à la carrosserie entièrement fabriquée en plastique.
Une carrosserie facile à enlever qui devait être interchangeable en fonction
des goûts du client.
Grâce à son faible poids, les équipes ont eu une marge de manœuvre
supplémentaire pour rigidifier la Z1 sans en faire un poids lourd. Avec 1250 kg
ce n’est pas vraiment une ballerine, mais la rigidité est excellente. Cette
partie dévoile de nombreuses innovations, à commencer par son châssis conçu par
BAUR. La Z1 est donc dotée d’une monocoque en acier galvanisé à chaud diminuant
le risque de corrosion et augmentant la rigidité en torsion.
Autre innovation, le plancher, fabriqué en matériaux composites, est
vissé et collé permettant d’augmenter également la rigidité. Le pare-brise
cache aussi un tube en acier améliorant la rigidité de la cellule centrale tout
en faisant office d’arceau de sécurité. L’essieu arrière multibras dénommé Z
est entièrement nouveau et brille par ses valeurs d’accélération transversale
élevées. Cet essieu sera ensuite repris sur le reste de la gamme.
Une conception innovante qui fait le bonheur du pilote sur la
route. La voiture est agile et précise comme les coupés de la marque. À son
volant, on n’a pas l’impression de conduire une voiture dont la conception date
des années 80. Une belle prouesse qui participe au plaisir de conduire tout
comme ses portes rétractables. Grâce à des bas de caisse épais et renforcés, la
Z1 résiste aux normes des chocs latéraux de l’époque et s’octroie le droit de
rouler les portes ouvertes comme sur un buggy. Quel pied !
Le plaisir de conduire est aussi mis en valeur avec une position
de conduite semi allongée parfaite. Les sièges Recaro participent à cette
ambiance plaisante et nous font regretter que le Z1 n’ait pas un caractère
moteur plus rageur à cause de sa boîte mécanique à l’étagement long. On prend
finalement plaisir à rouler à vive allure sur les petites départementales,
bercé par le chant très agréable du 6 cylindres.
Un tableau idyllique qui s’accompagne d’une très bonne fiabilité
et d’une bonne disponibilité des pièces détachées mécaniques. Toutefois, la
carrosserie reste difficilement trouvable et onéreuse et la capote est assez
fragile dans le temps avec sa lunette arrière souple. Si l’entretien a été
parfaitement réalisé, vous pouvez y aller les yeux fermés.
Encore une fois, le roadster a servi à montrer l’étendue du
savoir-faire de BMW. Ici, l’innovation a été portée à son paroxysme, mais c’est
pour le bien de son conducteur. Chaque instant passé à son volant procure une
expérience de conduite unique et un plaisir de conduire intense. Une voiture
atypique et révolutionnaire qui a ressuscité le segment des roadsters. De
telles innovations ont conduit à un prix de vente élevé réduisant ses chances
de grande diffusion. Entre 1988 et 1991, 8000 exemplaires ont été produits avec
seulement 347 exemplaires livrés en France. Un premier chapitre qui a ouvert la
voie à une belle lignée de roadsters à la fois plus abordable avec le Z3 (lire : Essai BMW Z3M, un cabriolet comme on les ///M) mais
tout aussi innovante et élitiste avec la Z8. Une voiture fiable, attachante et
rare. Un vrai collector dont la cote ne cesse d’augmenter, surtout quand cet exemplaire
a servi au Père Noël pour distribuer les cadeaux lors de sa tournée 2022 ;)
Photos et texte par Donatien Le Clainche