Mercedes 300 SL, 280 SL et SLS AMG : des étoiles au sommet

29.09.2023

L'histoire de l'automobile est indissociable de Mercedes. Comme toute marque pionnière qui se respecte, le constructeur s'est rapidement engagé en compétition pour faire connaître ses modèles et démontrer leur durabilité. Entre les deux guerres, les Mercedes de compétition, revêtues d'une livrée grise argentée, ont mérité le surnom de "Flèches d'Argent" et ont remporté de nombreuses courses. L'histoire a connu des moments sombres avant de retrouver un essor économique et un renouveau de la compétition automobile dans les années 50. À ce moment-là, Mercedes a ressorti ses voitures d'avant-guerre, mais elles se sont rapidement révélées dépassées sur le plan technologique. Il a donc été décidé de concevoir une toute nouvelle voiture de course pouvant être engagée dans diverses compétitions à travers le monde. Le projet W194 est né. La mise au point a été confiée à Rudolf Uhlenhaut, un ancien pilote, qui a cherché à utiliser de nombreuses pièces déjà existantes pour réduire les coûts. Le moteur retenu était le six cylindres en ligne de 170 ch de la 300 Adenauer, qui avait déjà fait preuve de sa fiabilité à de nombreuses reprises. Pour améliorer les performances, sa culasse a été fondue en aluminium et trois carburateurs Solex inversés ont été montés. De même, la boîte de vitesses à quatre rapports synchronisés, qui avait déjà fait ses preuves sur la 300, a été utilisée. La fiabilité était donc au centre des préoccupations, mais l'utilisation de ce moteur et de cette transmission n'offrait pas des performances exceptionnelles sur le papier. Pour pallier ce manque de puissance, il a été décidé de développer une carrosserie ultra-légère.

Rudolf retient l'idée d'un châssis-treillis composé de petits tubes soudés en triangle, ne pesant que 50 kg tout en restant très rigide. Par la suite, le talentueux Friedrich Geiger signe une carrosserie en alliage d'aluminium et de magnésium dictée par l'aérodynamique, en optant pour un habitacle réduit en largeur et en hauteur. Étant donné que le châssis ne permettait pas d'adopter des ouvertures conventionnelles, un ingénieux système de portes "papillon" a été développé pour permettre l'accès à l'habitacle. L'ensemble de ces innovations a permis d'atteindre un excellent coefficient de traînée (Cx) de 0,25 et un poids total de 1080 kg.

Cette remarquable Mercedes 300 SL, signifiant "Sport Leicht" en allemand, a fait son apparition aux Mille Miglia en mai 1952 et s'est déjà distinguée en remportant les première et quatrième places. Quelques semaines plus tard, les nouvelles "Flèches d'Argent" ont monopolisé les trois marches du podium lors du Grand Prix de Berne. En juin de la même année, une 300 SL a remporté les 24 heures du Mans en établissant un record de vitesse avec une moyenne de 155,575 km/h.

La saison s'est achevée avec la célèbre course Carrera Panamericana au Mexique, où deux 300 SL, équipées de moteurs réalésés pour l'occasion, ont monté avec succès sur le podium.

La Mercedes 300 SL conçue pour les Etats-Unis

Les succès retentissants de la 300 SL ont rapidement attiré l'attention de Max Hoffman, importateur de voitures européennes de luxe aux États-Unis. Il a vu en cette voiture l'opportunité de renforcer l'image de Mercedes sur le marché américain. Il a convaincu les dirigeants de la société de produire une version routière de ce modèle pour satisfaire leur clientèle aisée, allant jusqu'à passer commande des 1000 premiers exemplaires en versant un acompte. La Mercedes 300 SL de type W198 a fait ses débuts au Salon de l'Automobile de New York en 1954, et elle a immédiatement conquis le cœur des amateurs de voitures, devenant ainsi la voiture de sport la plus rapide du monde à sa sortie, avec une vitesse maximale de 225 km/h.

La 300 SL a troqué son aspect lisse pour une carrosserie un peu plus luxueuse mais la filiation est évidente. Sa carrosserie peut toujours être composée en aluminium mais cette option très onéreuse ne sera cochée que pour 29 exemplaires au total. Le reste de la production sera réalisé en acier sauf pour les portes, le coffre et le capot qui resteront en aluminium. Sous le capot, les carburateurs ont été remplacés par une injection Bosch novatrice, faisant de la 300 SL la première Mercedes équipée de cette technologie avancée.

La 300 SL était un chef-d'œuvre technologique, mais son prix élevé a incité, toujours à la demande de Hoffman, la création d'une version plus abordable, la 190 SL, apparue en 1955. Elle offrait le charme de la 300 SL et reprenait certaines de ses technologies, telles que la suspension à double triangulation et un essieu arrière oscillant, tout en proposant une carrosserie cabriolet et un modeste moteur 4 cylindres de 1,9 litre alimenté par carburateur développant 105 ch. Malgré cela, elle pouvait atteindre une vitesse maximale honorable de 175 km/h.

Cette petite SL a rencontré un grand succès, incitant Hoffman à commander une version roadster de la 300 SL. Lors du Salon de l'Automobile de Genève en 1957, la 300 SL roadster a pris la relève de la version coupé. Malgré son aérodynamique moins favorable et son surpoids de 35 kg, la 300 SL a encore séduit davantage le marché américain, qui était friand de cabriolets sportifs et luxueux. En effet, cette 300 SL a évolué vers une orientation plus luxueuse, jetant ainsi les bases de la gamme SL.

Pour satisfaire les nostalgiques de la version coupé, un hardtop a été introduit en 1958 (ajoutant 40 kg). En 1961, la 300 SL a adopté quatre freins à disque, une caractéristique qui était auparavant un brevet de Jaguar. Enfin, en 1962, elle a proposé une dernière évolution avec un bloc moteur en aluminium. En 1963, cette légende s'est arrêtée après la production de 3258 exemplaires, dont 1858 roadsters, dont plus de 80% ont été vendus sur le marché américain.

Une icone en remplace une autre : la Mercedes “ Pagode ”

La fin de cette icône ne signifiait pas pour autant la fin de la lignée, car la même année, lors du Salon de l'Automobile de Genève, la nouvelle Mercedes 230 SL a été présentée. La même équipe de développement qui avait travaillé sur la 300 SL avait pour objectif de concevoir une voiture intermédiaire entre la 300 SL et la 190 SL. Elle était donc équipée d'un moteur 6 cylindres de 2,3 litres développant 150 ch, le tout dans un gabarit plus compact. Sa silhouette emblématique a été conçue par le designer français Paul Bracq, notamment le hardtop en forme concave, ce qui lui a valu le surnom de "Pagode" en raison de son style rappelant les toits pyramidaux des temples d'Extrême-Orient.

Restant fidèle à son héritage d'innovation, cette SL a introduit pour la première fois sur une voiture de sport une carrosserie dite "de sécurité". Conçue par Béla Berényi, elle comportait une cellule centrale renforcée pour la protection des occupants, entourée d'une carrosserie étudiée pour se déformer et absorber les chocs en cas d'accident. Soixante ans plus tard, ces mêmes principes guident encore la conception de nos voitures. Elle a, également, été la première Mercedes à adopter des pneus à structure radiale.

En décembre 1966, la 250 SL a pris la place sur les lignes d'assemblage, dotée d'un moteur plus coupleux qui permettait une meilleure accélération. La puissance et la vitesse maximale de 200 km/h sont restées inchangées. Cette version a également vu l'apparition de la rare déclinaison California Coupé, qui remplaçait la capote par une banquette pour en faire un coupé 2+2.

En 1968, la Pagode a adopté un moteur plus puissant de 170 ch. La 280 SL est devenue le modèle le plus populaire de la série. Nous avons la chance d'accueillir un magnifique exemplaire entièrement restauré qui marie avec élégance le blanc et le bleu marine. En mars 1971, la Pagode a cessé d'être produite pour laisser la place à de nouveaux modèles qui allaient devenir de plus en plus luxueux.

La descendance spirituelle : la Mercedes SLS AMG

Au début des années 2000, le SL est devenu un lourd et luxueux coupé cabriolet qui n’a de sportif que le nom. À cette même période, la supercar SLR issue d’une collaboration entre McLaren et Mercedes brille plus par son design spectaculaire que par ses performances sur circuit. Une aventure qui mettra un terme à la collaboration ne laissant potentiellement aucune descendance à la SLR mais c’était sans compter sur le préparateur maison, AMG, qui a vu l’opportunité de développer son premier modèle 100% inédit qui ne dérive pas d’un modèle de série.

En 2009, la Mercedes SLS AMG a surpris le monde entier par son design majestueux et original. Développée sous la direction de Gordon Wagener, la SLS (pour Super Light Sport) a puisé son inspiration de la 300 SL sans toutefois tomber dans le piège du néo-rétro. Cet exercice de style a été couronné de succès avec des clins d'œil au modèle original, comme la grande calandre arborant l'étoile, le long capot, l'arrière bombé, l'habitacle plus étroit, et bien sûr, ses portes papillon ou "ailes de mouette" en allemand (Gullwing). Ses dimensions imposantes lui confèrent une prestance unique : plus de 2 mètres de large entre chaque rétroviseur, plus de 4,6 mètres de longueur et moins de 1,3 mètre de hauteur. Son design a été largement récompensé dans le monde entier.

Sous cette carrosserie exceptionnelle se cachent des technologies tout aussi remarquables. Comme sa sœur spirituelle, la SLS adopte une structure en treillis en aluminium, et sa carrosserie est entièrement en aluminium, ce qui garantit un poids contenu à un peu moins de 1700 kg, soit moins de 300 kg par rapport à une SL 63 AMG équipée du même moteur. L'équilibre des masses a été une préoccupation majeure pour les concepteurs, avec une répartition de 47 % à l'avant et 53 % à l'arrière, obtenue grâce à l'architecture transaxle. Le moteur, situé le plus au centre à l’avant, envoie sa puissance via un arbre de transmission en carbone vers la boîte de vitesses à double embrayage située sur l'essieu arrière.

En ce qui concerne le moteur, la SLS ne fait pas de compromis en incorporant le somptueux V8 atmosphérique de 6,2 litres, spécialement revisité pour l'occasion. Avec ses 571 ch et 650 Nm de couple, il atteint quasiment le rendement exceptionnel de 100 ch/L. Cela a été possible grâce à un travail en profondeur, comprenant notamment une révision de l'admission, des modifications de l'arbre à cames et de la commande des soupapes. Pour garantir la fiabilité, les pistons sont forgés, les paliers sont renforcés, et la pompe à huile est de haute performance. De même, les éléments de la suspension à double triangulation sont en aluminium forgé.

La SLS est une voiture sans compromis qui procure un plaisir de conduite intense grâce à son comportement dynamique et à son caractère moteur incomparable par rapport aux moteurs turbos.

Ce modèle rend un hommage réussi à la 300 SL, apprécié d'autant plus lorsqu'il est observé à côté de son aînée. Cette rencontre exceptionnelle dans notre showroom marque la fin de notre voyage à travers certaines des versions les plus emblématiques de la lignée des Mercedes SL. N'hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez acquérir un chapitre de cette histoire.

Photos et texte par Donatien Le Clainche

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