Imaginez-vous cheveux au vent, à vous amuser à chaque virage
qui se dessine devant vous, sans penser à rien d’autre que conduire. Dans les
années 1990, les roadsters et plus généralement les cabriolets redeviennent à
la mode, avec la mythique Mazda MX5. BMW emboîte le pas en 1995 avec un roadster
accessible et fun : le BMW Z3, qui renoue avec une tradition
ancestrale de la marque. Au fil des ans, il se dévergonde pour aller titiller
une autre concurrence. Retour sur ce modèle emblématique qui souffle ses 30
bougies.
BMW avait laissé tomber les roadsters depuis la mythique –
et très rare – BMW 507. Un modèle superbe, mais qui avait bien failli faire
couler le constructeur... peut-être un traumatisme resté dans les mémoires ?
C’est surtout à cause des normes américaines des années
1970, établies après le tollé du livre Unsafe at any speed de Ralph
Nader, que les cabriolets sont tombés en disgrâce. Porsche avait par
exemple conçu son système Targa pour y répondre.
Avec l’évolution des normes et des technologies, les vrais
cabriolets font leur retour au milieu des années 1980. BMW tente alors une
nouvelle incursion sur le marché avec un modèle expérimental : la BMW Z1
(que nous vous avons fait essayer ici). Avec son 6 cylindres, sa carrosserie en
plastique et un gros travail sur l’aérodynamique, la Z1 se veut être une
vitrine technologique. Son prix élevé et son côté atypique limiteront son
succès à seulement 8 013 exemplaires.
Il restait donc un boulevard pour un roadster plus
accessible... et c’est chose faite en 1995 avec la présentation du BMW Z3 au
Salon de Genève.
Signé Joji Nagashima, le Z3 propose une silhouette élégante et sportive,
relevée d’une touche néo-rétro avec ses ouïes latérales. Son long capot, ses
porte-à-faux courts, son habitacle reculé et sa capote électrique lui donnent
tous les atouts pour séduire. Et le coup de foudre est immédiat.
Dès la fin 1995, il est propulsé au rang d’icône grâce à son
apparition dans le James Bond GoldenEye. Une publicité habile qui
booste sa désirabilité.
Plus accessible grâce à une conception maîtrisée, le Z3
débute sa carrière en beauté. Certes, la finition reste assez légère et les
ingénieurs ont largement pioché dans la banque d’organes BMW : châssis de
Série 3 E36 raccourci de 25 cm, trains roulants issus de la compacte
eux-mêmes dérivés de la E30 (lire notre article “ 50 ans de la BMW Série 3 ”).
Sous le capot, on retrouve de modestes 4 cylindres :
le 1.8 de 115 ch et le 1.9 de 140 ch. Le Z3 se veut fun avant tout, en misant
sur l’agilité plutôt que sur la performance... mais cela ne va pas durer
longtemps.
Avec l’arrivée de nouveaux concurrents sur le marché, comme
la Porsche Boxster, BMW décide de répondre en faisant entrer son Z3 dans une
gamme supérieure.
Ça tombe bien : la plateforme de Série 3 E36 permet l’adoption de moteurs 6
cylindres. On retrouve alors sous le capot le 2.8 de 193 ch, qui se
distingue par sa double sortie d’échappement et ses ailes élargies.
Une montée en gamme bienvenue... mais pas suffisante pour un
certain Rolland Pelras.
Début 1996, un drôle d’engin fait ses premiers tours de roue
et attire l’œil des magazines spécialisés. À première vue, cela semble être un
simple Z3 1.9, mais quelques détails trahissent sa véritable identité. Son
assiette rabaissée de 5 cm et ses voies élargies mettent la puce à l’oreille.
La sonorité ne laisse plus aucun doute : derrière cette robe
grise se cache un projet fou lancé par Rolland Pelras avec l’aide de Jean‑Marie
Collon, celui de créer une sorte de Z3 M avant l’heure. Le projet
voit le jour rapidement, avant même la révélation officielle du Z3 M par BMW.
Une base de 1.9 est utilisée pour y greffer le moteur 6
cylindres 3.2 de la M3 E36 porté à 350 ch. On retrouve son train avant et,
à l’arrière, une traverse de M3 Groupe A avec triangles modifiés et renforcés
de la M3 2.5, ainsi que le pont arrière de la M3 Groupe A.
De nombreuses autres modifications complètent l’ensemble :
échappement sur mesure, arbre de transmission spécifique, adoption d’un
différentiel ZF à 50 %, pose de ressorts Eibach avec amortisseurs Bilstein,
renforcement du châssis et jantes BBS en magnésium et aluminium.
Résultat : 1 300 kg sur la balance, un tempérament bien
trempé et une vitesse de pointe de 280 km/h. Un prototype unique, qui sera
suivi rapidement d’une vraie version produite par BMW.
Au Salon de Genève 1997, le Z3 M de série se dévoile.
Un projet fou qui donne à la voiture un aspect d’AC Cobra : une petite caisse
légère avec un moteur de course, la recette de la passion.
Sous le capot, on retrouve le nouveau 6 cylindres 3.2 à
double Vanos de la M3 E36, délivrant 321 ch et 350 Nm de couple. À l’avant,
l’essieu de la M3 est adopté et le train arrière est revu. Des jantes de 17
pouces à grand déport sont montées, le kit carrosserie devient plus expressif,
et les chronos s’affolent : 0 à 100 km/h en 5,4 s et 250 km/h en vitesse
de pointe (lire l'essai).
Le châssis est légèrement mis à l’épreuve par la puissance,
et le Z3 M se montre délicat à mener à la limite, sans aides à la conduite. Une
voiture passionnante qui donnera l’idée à certains ingénieurs de produire une
version Coupé, plus rigide.
C’est chose faite en 1998, au Salon de Francfort, avec le
BMW Z3 Coupé. Son look original signé Chris Bangle lui donne un aspect
break de chasse unique. Il devient plus pratique avec jusqu’à 410 l de coffre
contre 165 l sur le roadster et devient surtout plus sportif, uniquement avec
des 6 cylindres sous le capot.
La Z3 M Coupé est 2,6 fois plus rigide que son homologue
roadster. Dès 1998, elle s’illustre sur les circuits en catégorie FFSA GT4
dans une version modifiée et allégée de 200 kg. Avec une gestion électronique
retravaillée, le 6 cylindres délivre 330 ch à 8 000 tr/min, et même 375 ch en
2001 avec 90 kg de moins (1 100 kg).
En toute fin de carrière, le Z3 M bénéficiera du 6 cylindres
3.2 S54 de 325 ch de la nouvelle M3 E46.
Les versions classiques reçoivent un restylage en 1999
avec des ailes plus galbées, des feux en L et une finition intérieure
améliorée. Les moteurs évoluent également : le 1.8 passe à 118 ch, le 1.9 à 140
ch, un nouveau 6 cylindres 2.2 de 170 ch est introduit et le 2.8 est remplacé
par le 3.0 de 231 ch.
Entre-temps, un prototype unique est conçu en
collaboration avec le magazine allemand Auto Zeitung, avec le V12 5.4
BMW de 326 ch et 490 Nm monté au chausse-pied pour un projet délirant.
La BMW Z3 quitte la production le 28 juin 2002, forte d’un
beau succès : 297 088 exemplaires produits dans l’usine américaine de
Spartanburg, dont 17 815 Coupés et 21 613 versions M confondues (6 291 Z3 M
Coupé).
Les versions 6 cylindres ont marqué les esprits, et BMW a
poursuivi sa montée en gamme avec le Z4, qui ouvre la voie à sa succession.